Dans le contexte des changements climatiques, la gestion des ressources en eau est devenue un élément de préoccupation majeure. Un des objectifs de cette gestion est de maintenir le bon état quantitatif des masses d’eau, autrement dit un équilibre durable entre les prélèvements et les ressources disponibles.

Eaux de surface principalement pour le refroidissement, eaux souterraines principalement pour la distribution publique

En 2020, la Wallonie a puisé près de 1 430 millions de m3 d’eau dans ses cours d’eau et ses nappes d’eau souterraine.

Les prélèvements en eaux de surface représentaient 1 062,3 millions de m3, soit près de 3 fois les volumes extraits des aquifères. Toutefois, 866,7 millions de m3, soit 81,6 % des prélèvements en eau de surface, ont été prélevés pour le refroidissement des centrales électriques, et majoritairement restitués aux cours d’eau après usage. Le solde des prélèvements en eaux de surface était consacré aux processus de refroidissement des industries (2,5 %), à d'autres utilisations industrielles (7,7 %) et à la distribution publique (8,2 %).

Entre 2000 et 2020, les prélèvements en eaux de surface ont diminué de 65 % principalement grâce à une réduction des quantités utilisées par les centrales électriques et les industries (baisse de la production des centrales électriques, mise en circuits fermés des eaux de refroidissement, fermetures d’entreprises…). Entre 2019 et 2020, la baisse (- 31 %) s’explique principalement par l'arrêt temporaire des 3 réacteurs de la centrale nucléaire de Tihange courant 2020 : Tihange 1 en raison de travaux destinés à prolonger sa durée de vie, Tihange 2 pour une recharge en combustible et des travaux de maintenance et Tihange 3 pour des travaux de construction.

Les prélèvements d'eau souterraine s'élevaient quant à eux à 368,3 millions de m3 en 2020, dont 78,7 % étaient destinés à la distribution publique d’eau potable q. Les industries extractives (eau d’exhaure des mines et carrières) ont utilisé 10,9 % des volumes captés en eaux souterraines tandis que les autres industries en ont utilisé 7,2 %. Les prélèvements pour la production de boissons concernaient 1,4 % des volumes prélevés tandis que ceux de l'agriculture représentaient 1,0 %[1]. Les autres activités (particuliers, campings, services…) comptaient pour 0,8 %. Entre 2000 et 2020, les prélèvements en eaux souterraines sont restés relativement constants.

Prélèvements en eaux de surface et en eaux souterraines en Wallonie

 

Utilisations des prélèvements en eaux de surface en Wallonie (2020)

 

Utilisations des prélèvements en eaux souterraines en Wallonie (2020)

 

Plus de sites de production dans le nord de la Wallonie

En 2020, parmi les 83 sites de production d’eau[2] à partir d’eau souterraine débitant plus d’un million de m3/an, 65 concernaient la production d’eau de distribution (205,6 millions de m3), 12 concernaient des carrières (30,0 millions de m3, principalement dans le Hainaut) et 6 concernaient des industries (13,8 millions de m3). Leur production cumulée s'élevait à 249,4 millions de m3. Les sites de production les plus importants (volumes d’eau souterraine prélevés supérieurs à 10 millions de m3) étaient ceux de Modave (20,1 millions de m3), des galeries de Hesbaye (15,0 millions de m3) et des galeries du Néblon (Ouffet) (10,7 millions de m3). Ces sites de production, qui comptaient au total pour 45,9 millions de m3, étaient exclusivement destinés à la production d’eau de distribution et représentaient 16 % des prélèvements en eaux souterraines.

La même année, la Wallonie comptait 25 sites de production d'eau à partir d'eau de surface débitant plus de 1 millions de m3/an. Parmi ces sites, 5 concernaient le refroidissement et/ou fonctionnement[3] des centrales électriques (865,9 millions de m3), 15 concernaient des utilisations industrielles y compris le refroidissement de ces industries (94 millions de m3), 5 concernaient la production d'eau de distribution (86,8 millions de m3). Les principaux sites de production à partir d’eau de surface étaient ceux de la Meuse à Tailfer (46,3 millions de m3), de la Vesdre à Eupen (17,0 millions de m3), de la Gileppe à Baelen (13,9 millions de m3), de l’Ourthe à Nisramont (6,7 millions de m3) et du Ry de Rome à Couvin (1,7 millions de m3). Leur production cumulée s'élevait à 85,6 millions de m3 et représentait 99 % des prélèvements en eau de surface destinés à la distribution publique, mais seulement 8 % des prélèvements totaux en eaux de surface. À noter que lorsque le niveau des nappes n’est plus satisfaisant, comme c’est parfois le cas en période de sécheresse prolongée, les producteurs d’eau sont amenés à effectuer davantage de pompages en eaux de surface.

La majeure partie des sites de production d'eau de distribution, que ce soit à partir d'eau de surface ou d'eau souterraine, sont situés dans le nord de la Wallonie où les pressions anthropiques sont plus fortes (agglomérations, activités industrielles, agriculture intensive). Les sites de production à partir d'eau souterraine débitant plus d’un million de m3/an sont tous situés en zones vulnérables du point de vue du Programme de gestion durable de l'azote en agriculture q. Des mesures sont prises pour leur protection q.

Sites de production d'eau à partir d’eau de surface et souterraine (≥ 1 million de m³)* en Wallonie

3f5f76b5-550f-4563-b7b4-df79151c1dbd

* La carte ne concerne que les sites de production d'eau qui débitent plus de 1 million de m3. Les sites de production d'eau de moins de 1 million de m3 (84) représentent un volume de 108,9 millions de m3.

** Voir fiche d'indicateur "Schéma régional des ressources en eau". q


Préserver les équilibres

La directive 2000/60/CE q oblige les États membres à faire en sorte que leurs masses d’eau souterraine atteignent le bon état quantitatif, c'est-à-dire l’équilibre entre les prélèvements et la recharge. Actuellement, les ressources hydriques de la Wallonie restent suffisantes pour assurer ses besoins, ceux de Bruxelles et contribuer à ceux de la Flandre q, malgré des problèmes locaux de surexploitation ou de pénuries qui peuvent survenir certaines années :

  • entre 2000 et 2020, les prélèvements dans les nappes d’eau souterraine représentaient en moyenne au maximum 22 % (381 millions de m3 par an) des volumes qui étaient renouvelés annuellement par la recharge pluviométrique[4] ;
  • malgré une densité de prélèvement en eaux souterraines relativement élevée (environ 21 800 m3/km2 en 2020[5]), le taux d’exploitation en eau[6] de la Wallonie était estimé à 3,7 %, une valeur inférieure au seuil européen de stress hydrique fixé à 20 %[7].

Pour limiter les effets des sécheresses sur les ressources en eau, le Service public de Wallonie et les opérateurs publics du secteur de l'eau ont élaboré une Stratégie intégrale sécheresse (SIS), approuvée par le Gouvernement wallon en 2021. La SIS comprend notamment :

  • des mesures portant sur la gestion de la demande : élaboration d’un cadre légal pour appliquer une hiérarchisation des usages de l’eau en période de sécheresse (avec définition de zones d’alerte, de seuils d’alerte et de listes de mesures de restriction), limitation des prélèvements en période de sécheresse, fixation de volumes prélevés maximum autorisés (pour les gros prélèvements), fixation de quota de prélèvements pour les masses d’eau déficitaires, régulation du nombre de prises d’eau… ;
  • des mesures de sécurisation de l’alimentation en eau et de l’exploitation durable des ressources en eau, via le Schéma régional des ressources en eau (SRRE) q ;
  • des mesures visant une valorisation accrue de ressources existantes et de nouvelles ressources (équipements utilisés en sous-capacité, eaux potabilisables non encore exploitées, eaux d’exhaure…).

En 2021, le Plan de relance de la Wallonie q a retenu 4 projets pilotes qui s'inscrivent dans les objectifs de la SIS. Ils portent sur la réutilisation de l’eau (eaux traitées en sortie de station d’épuration) pour l’agriculture et l’industrie, la création de réseaux d’alimentation en eau décentralisés (alimentation en eau de qualité adaptée aux besoins d’une certaine zone, à partir de ressources locales), la mise en place de structures de stockage d’eau et d’irrigation via l’aménagement foncier rural et l’amélioration de la performance des infrastructures publiques d’alimentation en eau potable (réduction des fuites du réseau de distribution d'eau potable).
 


[1] Cette part est vraisemblablement sous-estimée en raison de l'absence de données pour les prélèvements effectués par les agriculteurs dans les puits non déclarés, tout comme pour les prélèvements effectués dans les cours d'eau.

[2] Un site de production peut regrouper plusieurs captages.

[3] La centrale électrique de Roux fonctionne en circuit fermé pour le refroidissement.

[4] Estimation selon le modèle EPICgrid(a).

[5] À titre de comparaison, en 2020, la densité de prélèvement en eaux souterraines était estimée à 9 300 m3/km2 en France, 17 200 m3/km2 en Allemagne et 34 300 m3/km2 aux Pays-Bas (estimation effectuée à partir des données Eurostat q).

[6] L'indicateur WEI+ (Water Exploitation Index) est le rapport entre le total des volumes prélevés (déduction faite des volumes restitués : eaux de refroidissement et fuites) et les ressources totales en eau(b).

[7] Le stress hydrique survient lorsque la demande en eau dépasse la quantité disponible pendant une certaine période ou lorsque la qualité médiocre de l’eau en limite l'utilisation. Le stress hydrique entraîne une détérioration des ressources en eau douce en termes de quantité (surexploitation des aquifères, assèchement des rivières...) et de qualité (eutrophisation, pollution par les matières organiques, intrusion saline...)(c).

Évaluation

075c013d-4ef7-4fd1-be26-c8ed42c4bcd6 Etat favorable et tendance à l'amélioration

Favorable
  • Référentiel : seuil de stress hydrique WEI+ (Water Exploitation Index)(b) (< 20 % = pas de stress hydrique)(c)
  • Le taux d’exploitation en eau (WEI+), estimé à 3,7 % pour l’ensemble de la Wallonie en 2020, n’indiquait pas de stress hydrique.
En amélioration

Les prélèvements en eaux de surface ont diminué de 65 % entre 2000 et 2020 tandis que les prélèvements en eaux souterraines sont restés relativement constants sur la période.